Nouvelle œuvre vidéoludique de Bloober Team (Blair Witch), The Medium était initialement prévu pour sortir comme jeu de line-up pour la nouvelle génération de Xbox, le propulsant donc première exclusivité de la Xbox Series X et Series S pour l’écosystème consoles (et PC). Si les plans sont restés inchangés, la crise sanitaire actuelle en a voulu autrement, forçant les équipes à travailler sur leur jeu en télétravail et les obligeant donc à repousser le titre au 28 janvier 2021.
Grosse attente pour certains, The Medium s’est avéré être pour beaucoup une déception. Alors que j’ai pu mettre la main sur la précieuse Series X il y a quelques semaines maintenant, son statut de « première exclusivité » a fait chavirer mon cœur. Je me suis donc lancé dans cette histoire atypique, au thème parfois mal aimé, pour me faire ma propre idée du nouveau bébé du studio polonais.
The Medium est-il injustement mal aimé?
Tout commence par la mort d’une petite fille. C’est le rêve que fait Marianne, le personnage, notre personnage, principal de The Medium. Un rêve qu’elle fait immanquablement, sans comprendre ce qu’il signifie. Jusqu’au jour où elle reçoit un mystérieux appel lui demandant son aide. Nous sommes à Cracovie, en 1999, et Marianne porte le lourd fardeau d’être medium. Un don qu’elle qualifie de malédiction, qui lui permet de traverser le chemin entre le monde réel et le monde spirituel, et lui donne la possibilité de communiquer avec les défunts et de les guider vers un « autre monde ».
Les premiers indices la guident vers Niwa, un endroit de villégiature pour les familles de la classe ouvrière, qui a ouvert ses portes dans les années 80. C’est là que le périple de Marianne prend un tournant bien différent de ce auquel elle pouvait s’imaginer. Mêlant visions du passé, surnaturel et histoire, The Medium peut-il devenir une nouvelle référence du genre?
Beaucoup diront que non, et pourtant le titre de Bloober Team a plus d’un tour dans son sac pour ne pas sombrer dans le vulgaire cliché ou copié collé de telle ou telle autre licence. Sans réellement devenir une référence à proprement parlé, il a les éléments pour marquer certains esprits.
Le premier, son écriture, aussi vague puisse-t-elle être, qui parsème le scénario de quelques indices pour nous mettre sur la voie du pourquoi du comment. Le talent certain du scénario, qui pousse à voir plus loin que le bout de notre nez et à tenter de faire un lien entre chaque événement. Et au sein de cette écriture, au sein de cette histoire atypique, une ambiance, incroyable, parfois pesante mais qui nous scotche les mains à la manette. La flipette que je suis habituellement a littéralement été subjuguée par cette ambiance, ses jeux de lumière, ses plans dignes des grands noms de l’horreur. Et pourtant, il n’est pas qu’un simple jeu d’horreur. Il ne l’est même pas du tout à mon sens. Il joue sur la tension, sur l’anxiété du moment, sur la peur oui, mais pas celle qui nous fait bondir de nos sièges toutes les 5 minutes. S’il sait jouer avec le macabre, dans lequel il trouve aisément ses limites pour ne pas en faire trop. C’est dans cette vision de la mise en scène de l’horreur que Bloober Team réussit un coup de maître pour raconter et montrer là où ils veulent en venir.
Mais aspirer à ne pas en faire trop peut aussi amener à ne pas en faire assez. Preuve en est que je lui ai trouvé un certain manque de développement de divers personnages et des lieux que l’on est amenés à visiter, sans les citer pour ne spoiler personne, on les aperçoit, on les voit, on les entend mais sans réellement comprendre ce qu’ils apportent ou ce qu’ils représentent. Le premier étant notre Nemesis. S’il est de mise de laisser peser le mystère qui plane autour de lui on aurait aimé comprendre plus que ce que le jeu daigne bien nous dire. Plus loin encore: la fin. De celles que je n’aime pas. Expéditive, facile, qui apporte certes un point final mais qui finalement nous laisse sur les dents. Et cela a été pour moi, le gros point noir du jeu.
Autre talent de The Medium: sa double réalité. En effet, outre les phases dans l’une ou l’autre réalité, le monde réel ou le monde spirituel, le titre propose de nous plonger simultanément dans les deux. Aux premiers abords, c’est assez déroutant. On ne sait pas sur quelle moitié de l’écran se concentrer en priorité, des éléments clés se trouvant dans l’une ou l’autre mais pas les deux en même temps.
En somme, Bloober a su exploiter l’univers de son jeu grâce à des mécaniques de gameplay peu communes. Loin de la vue à la première personne de Blair Witch, ils se sont tournés vers de la troisième personne en caméra fixe rappelant en leur temps Resident Evil ou encore Silent Hill. Un choix dont on ne peut pas leur en vouloir tant il se marie parfaitement au genre tant pour le bien scénaristique que pour l’ambiance visuelle en général.
Les mondes de The Medium ont pour principale activité l’exploration et la recherche (à noter qu’il est dénué de toute phase de combat à proprement parlé). Une exploration, malgré tout souvent scénarisée, qui demande un sens aigu de l’observation et de la fouille pour pouvoir passer à la suite. Et pour se faire, il a été inventif: sortir de son corps « réel » ou encore passer vers l’un ou l’autre côté grâce à des miroirs, The Medium a su trouver son identité en termes de gameplay. Je le disais précédemment, cette exploration est souvent scénarisée, et implique donc qu’on mette parfois de côté notre logique si on ne veut pas accumuler les « game over ». J’en ai fait l’expérience plus d’une fois et cela a parfois entaché l’action en cours et le sentiment d’urgence qu’elle impliquait. Oui, quand j’ai large le temps d’ouvrir une porte pour me barrer, je le fais, je prend pas le temps de tirer un machin qui pèse une toise et demie pour faire tomber un bout de bois (pourri, de surcroit). Bon, là je vous la fais sur le ton de l’humour, mais devant le fait accompli on regrette ces quelques passages scriptés.
Et si l’exploration n’est pas de la partie, place à la résolution d’énigmes et à la fuite. Si je ne m’attarderai pas sur ce deuxième point, il n’en reste pas moins un des aspects du jeu à mon sens le plus passionnant, angoissant et immersif. De là, motus et bouche cousue. Pour ce qui est des « énigmes », elles ne relèvent pas d’une grande difficulté si ce n’est que certaines, à l’approche de la fin du jeu, peuvent paraitre interminables.
Si je ne manque pas de faire les éloges sur l’ambiance générale de The Medium qui est à mon sens son plus gros point fort, il est de mise de parler de son aspect graphique brut. Première exclusivité de la Xbox Series X (et S et PC), on s’attendait sans aucun doute à ce qu’il exploite un tant soit peu ce qu’à la machine sous le capot. Si nous conviendrons de dire qu’il est quand même très loin d’être moche, on ressent indéniablement qu’il n’exploite pas la machine et qu’elle n’est encore qu’à ses premiers balbutiements. On lui accorde de somptueux décors extérieurs mais à côté de ça on ressent une certaine faiblesse du côté de la modélisation des visages et de leurs expressions. De mon côté, j’ai surtout rencontré quelques soucis d’affichages de textures et quelques baisses de fluidité par ci par là, rien de bien méchant.
Maintenant, le sujet qui fâche: la durée de vie. Au bas mot, il faut compter une petite dizaine d’heures, voir un peu moins. A la question, vaut-il son prix, chacun voit midi à sa porte, et y met le prix qu’il veut. Pour ce qui est de sa longueur en elle-même, The Medium n’a pas besoin d’être plus long. Je lui aurait accordé 5 heures de plus sans aucun mal, et pourtant il n’en a pas besoin. Il en dit assez pour nous tenir en haleine, au risque parfois de nous décevoir sur le développement de certains aspects.
Contre toute attente, j’ai aimé faire The Medium. Son univers, son écriture, ses personnages, son ambiance, tout était là pour me scotcher devant alors que je suis rarement cliente de ce type de jeu. Il n’est pas parfait, c’est un fait, on peut surtout lui reprocher de ne pas aller creuser assez loin dans l’écriture de ses personnages, ou encore quelques passages longuets qui manquent véritablement d’intérêt dans la narration (station de pompage, si tu me lis). Mais de bout en bout, The Medium a le mérite de nous faire visiter un univers auquel il faut être réceptif. Et malgré sa durée de vie que beaucoup qualifieront de trop courte, The Medium permet de ne pas tomber dans l’ennui et dans l’évidence. Une vertu souvent rare de nos jours.
Les plus
- La double réalité et la possibilité de vagabonder dans les deux mondes
- Une ambiance incroyable, sa plus grande force
- Les phases de poursuites angoissantes
- Un thème principal intelligemment abordé
Les moins
- La fin « tout ça pour ça? » trop expéditive
- Une dernière zone longuette
- Le développement de certains personnages qui méritaient plus
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