Il est relativement commun, de nos jours, que des œuvres sortent dans un silence le plus religieux qui soit. INDIKA est de ce genre là, puisque lors de sa sortie sur PC, puis maintenant sur consoles, il n’a pas fait grand bruit et pourtant, INDIKA, petite œuvre indépendante a tout ce qu’il faut pour marquer le joueur que je suis. Edité par 11 Bit Studios et développé par le jeune studio Odd Meter à qui l’ont doit leur premier jeu (de surcroit en VR) Sacralith The Archer’s Tale, INDIKA vous fait incarner une nonne qui doit voyager à travers une Russie alternative du XIXè siècle avec comme compagnon de voyage nul autre que le Diable lui même. C’est donc parti pour la messe de minuit mes tendres enfants. Amen.
Version | Numérique sur Xbox Series X fournie par l’éditeur |
Temps de jeu | Environ 4 heures |
Histoire terminée | Oui |
Complétion totale | 4 succès sur 16, soit 300G |
Difficulté | Unique |
Genre(s) | Aventure, Puzzle |
Date de sortie | 17 mai 2024 pour les versions consoles, 2 mai 2024 pour la version PC |
Prix (maximum conseillé) | 24€99 |
Plateforme(s) | PS5, Xbox Series X/S et PC |
Voix | Anglais, Russe |
Textes | Anglais, Allemand, Chinois, Espagnol, Français, Japonais, Polonais, Portugais, Russe, Ukrainien |
Je l’ai dit dans l’introduction mais INDIKA est développé par un studio russe qui désire nous mettre dans la peau d’Indika, une jeune nonne en apparence innocente, désireuse de vivre paisiblement dans une vie monacale. Mais sous ses airs de femme religieuse, se cache une âme tourmentée, sujette au tumulte subit par le Diable en personne. C’est alors que pour une raison dont je tairais volontiers le pourquoi du comment, elle doit quitter le couvent dans lequel elle vit pour se lancer dans une aventure dans une Russie du XIXème siècle, alternative à notre Russie de cette époque là. S’en suivra alors un périple teinté de moments étranges, loufoques et tristes qui pourrait rappeler les romans d’écrivains russe comme Boulgakov ou Dostoïevski.
Indika se veut être un TPS, en vue à la troisième personne cela va donc de soi mais sans le shooter, et vous demande de résoudre des puzzles parfois très logiques, parfois un peu plus « complexes » et est doté d’un système d’expérience un peu étrange. En effet, à chaque fois que vous réalisez une action religieuse (allumer un cierge, etc), vous obtenez des points de religion que vous pouvez dépenser dans un arbre de compétences lui aussi vraiment étrange.
Lors de votre voyage, vous devrez élucider des puzzles à la fois environnementaux, à l’aide (ou non) d’une mécanique de gameplay pour le coup totalement inédite où vous devrez jongler entre vos prières (vous êtes nonne, rappelons le) et la persécution du Diable pour vous frayer un chemin. De plus, lors de certains flashbacks sur sa vie d’avant, vous aurez droit à des mini-jeux en 2D et en pixel art rappelant des œuvres de jadis. En termes de gameplay pour ces courtes phases, on pourra reprocher un petit manque de maniabilité qui pourra frustrer tant l’habitude d’antan nous est passée.
Côté graphismes, INDIKA est développé à partir de l’Unreal Engine 4 et je dois bien vous avouer que je le trouve vraiment superbe dans les environnements que l’on traverse, avec un petit plus sur les intérieurs où le soin du détail m’a rappelé un certain Resident Evil Village par moment. Cette comparaison n’est évidemment pas à prendre au mot, elle ne reflète que mon ressenti en termes d’ambiance et d’un sens du détail particulièrement prononcé. Pour la faire courte, INDIKA est vraiment magnifique et m’a transporté dans son univers d’une bien belle manière.
Un mot sur la technique où ma session sur INDIKA s’est très bien passée même si je pourrais évoquer quelques ralentissements éparses ainsi qu’une traduction française intégrale un peu bizarre par moment. En effet, certains dialogues ne sont absolument pas retranscrits tels que dits par notre personnage, rendant donc la traduction inégale. Cela étant dit, j’y ai joué avec le doublage anglais et j’ai noté que les acteurs et actrices étaient toutes et tous dans le ton, mention à l’actrice de doublage d’Indika, interprétée par Isabella Inchbald (déjà entendue par exemple dans As Dusk Falls).
Je finirais par évoquer la bande son où je vous avoue que là encore, le studio a fait fort en nous proposant une bande originale qui n’est pas du tout en adéquation avec les apparences de leur œuvre. C’est totalement assumé et ça fonctionne étrangement bien. Plus loin encore, le sound design est lui aussi un franche réussite, que cela passe par l’ambiance globale du jeu mais aussi dans ses plus infimes détails, comme le bruit de pas sur la neige ou le grincement du bois.
Maintenant que le tour du propriétaire est fait, place à mon avis. J’ai découvert INDIKA il y a de ça 2 jours et je vous avoue que sans avoir vu le moindre trailer ni le moindre gameplay, j’ai demandé à couvrir cette petite œuvre qui est sortie dans un anonymat le plus complet sans regretter l’attention que je viens de lui porter. Ce qui est sûr, c’est que le jeu de Odd Meter est une œuvre étrange, singulière et unique en son genre qui propose une mécanique de gameplay elle aussi unique (mais qui n’en n’abuse pas, puisqu’utilisée 2 fois seulement dans toute l’aventure) et conjugue des idées folles pour en faire une œuvre atypique. De plus, INDIKA n’oublie de poser sur la table 2 débats portés sur l’idée du choix et de savoir ce qu’est l’âme humaine, des sujets de prédilection pour la littérature russe. C’est bien traité, avec intelligence, sans jamais nous donner son avis. Ce qui est un point fort selon moi, c’est de réussir à proposer un sujet de débat profond, tout en respectant le point de vue du joueur, en le laissant réfléchir dans son coin, sans le juger et de lui parler à d’égal à égal avec le respect auquel on a tous droit.
Il y a des œuvres qui sortent sans faire le moindre bruit que ce soit et qui se révèlent être bien plus intéressantes à découvrir que les gros AAA, souvent ronflants, qui en font des tonnes pour au final n’être qu’une simple œuvre qui doit convenir au plus grand nombre. INDIKA nous propose une histoire étrange, teintée d’un certain sens de l’humour bien noir (auquel certains joueurs ne peuvent donc pas être réceptifs), d’une noirceur singulière, de moments tristes mais aussi de moments plus légers, le tout en embarquant le joueur dans un double débat sur deux sujets de prédilection de la littérature russe. Une œuvre indé intelligente, singulière et pour le coup totalement inédite dont je ressors avec le sentiment d’une certaine joie d’avoir pu poser mes petites mains impies, heureux d’avoir pu découvrir que la scène indé est capable de vraiment tout, avec une liberté de ton qui fait vraiment plaisir à voir. Alleluia mes tendres enfants, repentez vous dans l’absolu et laissez Indika vous blasphémer de ses vœux pieux !
- Le personnage d’Indika, à la fois humaine et meurtrie par ses démons intérieurs
- Le scénario et la narration particulièrement maitrisés
- L’alternance entre jeu moderne sous UE4 et pixel art
- Un double débat qui s’installe avec intelligence et respect
- Une durée de vie correcte
- Graphiquement magnifique pour une si petite production
- Le doublage anglais très qualitatif
- La bande originale, assumée, aux antipodes du message de l’œuvre
- Quelques ralentissements ci et là à prévoir
- La traduction française parfois totalement hors sujet
- La maniabilité sur certains passages en 2D
- Pas de mode photo, c’est dommage aux vues de la qualité du jeu
Bonne critique comme toujours, pour une œuvre qui mérite qu’on s’y intéresse. Si tu as l’occasion de le refaire, je te conseille de le retenter en russe, ça donne un cachet inimitable