
Après La Légende Xenogears et Xenosaga écrit par Charles « KadMony » De Clercq publié en janvier 2022, il était évident que Third Editions dédierait un jour un ouvrage à la saga Xenoblade. A l’approche de la sortie de Xenoblade Chronicles X Definitive Edition sur Nintendo Switch, prévue pour le 20 mars prochain, c’est donc chose faite, la maison d’édition toulousaine est fin prête à publier l’ouvrage tant attendu par les fans, La Légende Xenoblade, dont la date de sortie est prévue le 13 février, comme d’habitude en édition standard dans toutes les bonnes librairies et en édition First Print exclusivement sur leur site. Et c’est Jérémie Priam qui s’est attelé à ce gros œuvre d’envergure…pour son tout premier livre.

Editeur | Third Editions |
Prix | 29€90 |
Date de sortie | 13 février 2025 |
Nombre de pages | 350 |
Format | 160 x 240 mm |
Couverture | Michael « Tetryl » Dognon |

Si c’est bien le premier ouvrage de Jérémie Priam, le voir en signer un dédié à Xenoblade n’est pas anodin. Amoureux de la pop culture et passionné d’imaginaire, et plus particulièrement des œuvres japonaises, il écrit un mémoire durant ses études qui porte sur la représentation des femmes dans le manga. Aujourd’hui adulte dans la vie active, il dédie son temps libre à la rédaction de façon occasionnelle pour le site Le Journal du Japon sur lequel il a bien évidemment dédié un article sur… Xenoblade Chronicles 3 en 2022. Mais pour décortiquer dignement cette licence si chère à son cœur il lui fallait un peu plus d’espace, pas moins de 350 pages.
« L’objectif du projet Xenoblade est clair: réaliser un véritable chef-d’œuvre du jeu de rôle japonais, destiné à connaître le succès au Japon et à l’international. » – Jérémie Priam – La Légende Xenoblade – Third Editions – page 37
Et n’y allons pas par quatre chemins, Jérémie Priam s’en sort avec les honneurs pour son premier coup d’essai. Dans un premier temps, impossible d’expliquer Xenoblade sans passer par la case Xenogears et Xenosaga qui ont bien failli coûter la vie au studio Monolith Soft s’il n’avait pas été racheté par Nintendo à temps. Des jeux devenus cultes mais qui à l’époque n’avaient pas la même réputation auprès de leurs joueurs ni de la critique. Dans ses premiers chapitres, il détaille donc avec minutie l’ambition de Tetsuya Takahashi, créateur derrière les jeux Xeno, sans oublier de parler du studio qu’il a fondé, Monolith Soft, le rachat par Nintendo, et son avenir en tant que l’un de ses studios fer de lance. Une étape somme toute obligatoire pour traiter sa dernière saga en date, notamment pour comprendre ses enjeux.

Une fois le contexte du développement de Xenoblade placé, l’auteur s’attelle donc à analyser les thèmes de chaque épisode (la trilogie numérotée ainsi que son spin-off X), ainsi que leurs dimensions philosophiques qu’elles soient Jungiennes, Nietzschéennes ou même Platoniciennes, religieuses, et psychologiques. Une partie qui prendra plusieurs chapitres à l’auteur pour nous expliquer avec le plus de précisions possible comment Xenoblade est la licence qu’elle est devenue aujourd’hui, si chère aux adorateurs de J-RPG.
« Les différents volets de Xenoblade apparaissent de façon indéniable comme des contes philosophiques modernes, contribuant à transmettre derrière leur façade de simples J-RPG des idées politiques et philosophiques. » – Jérémie Priam – La Légende Xenoblade – Third Editions – page 170
Il évoque également les différences entre les versions occidentales et japonaises, un aspect qui peut paraitre anodin mais qui pourtant permet à Xenoblade d’être perçu de façon relativement différente dans chaque culture. Il n’en oublie évidemment pas de passer au peigne fin le DLC Torna de Xenoblade 2, l’ultime extension de Xenoblade 3 « Un avenir retrouvé » sans oublier l’épilogue additionnel apporté à la Definitive Edition de Xenoblade premier du nom lors de sa sortie sur Switch, « Un avenir commun« . Chaque jeu est traité de façon chirurgicale, s’entremêlant les uns aux autres ou de façon indépendante, faisant même parfois lien avec Xenogears et Xenosaga, le tout sans que la lecture ne soit entachée et trop lourde et abrupte.

Il s’attarde également sur la partie musicale, rappelant sans nul doute les analyses de Jérémie Kermarrec, que l’on connait pour son amour pour la musique de la saga Final Fantasy (à laquelle il a dédié un ouvrage entier, chez Third Editions également), tant il décortique l’OST, certaines pistes clés, les instruments utilisés avec la même précision, déroutante et passionnante. Par la lecture de cet ouvrage, la saga Xenoblade se dévoile bien plus complexe qu’on ne l’imagine aux premiers abords puisque rien n’est laissé au hasard pour que le tout se conjugue à merveille pour servir la totalité du gameplay de chaque épisode.
« Xenoblade est un titre qui a changé la route de Monolith Soft et qui est devenu la pierre angulaire de notre croissance. Nous avons réalisé ce jeu avec la détermination, la passion et l’amour que l’équipe a déversés […], qui résonne avec l’équipe que nous avons aujourd’hui. Et dans le même temps, cela préfigure la forme que vont prendre nos projets futurs. » – Interview de Testuya Takahashi par Famitsu en 2020 – Jérémie Priam – La Légende Xenoblade – Third Editions – page 48
Au travers de la plume de Jérémie Priam, la saga Xenoblade se révèle à nous comme étant la métaphore d’un concert pendant lequel le talent de son chef d’orchestre mène ses musiciens du bout de sa baguette. Toute symphonie résulte de la coordination de chaque acteur présent sur scène et chaque note doit sonner juste et harmonieuse. Son analyse et son décryptage s’articulent autour de cette idée: mettre tous ces artistes, qu’ils soient internes à Monolith ou non, qui ont œuvré sur la saga sur les devants la scène. Ou comme il utilise lui-même une autre métaphore, très appropriée, Tetsuya Takahashi est l’Architecte de la saga qui dirige ses artisans, autrement dit les scénaristes, compositeurs, studios d’animations mais aussi character designers, pour proposer une saga unique et hors du commun. On tourne les pages comme on avancerait dans une quête, filant vers notre objectif principal tout en s’écartant du chemin pour explorer les tréfonds de cette saga devenue un incontournable du genre.

La pertinence presque maladive de l’analyse de Jérémie Priam est palpable à chaque nouveau chapitre, chaque nouveau paragraphe et même à chaque page que l’on tourne. Les anecdotes fusent, les citations sont nombreuses pour nous expliquer Xenoblade dans ses moindres détails, les moindres recoins de son univers, de ses mondes, et chaque parcelle de personnalité de ses personnages. On visualisera même bien souvent les scènes les plus marquantes et les plus poignantes des jeux en le lisant. La Légende Xenoblade transpire un amour profond, non seulement pour la saga elle-même mais aussi une profonde admiration pour son créateur et les artistes qui l’ont accompagné, parfois même depuis Xenogears. Jérémie Priam propose ici un ouvrage impressionnant tant par son contenu que par la clarté de ses propos, chaque sujet traité est limpide, et chaque analyse est passionnante.
« La saga Xenoblade est ainsi indissociable de la passion de ses artisans pour la japanimation: celle-ci participe à donner à la série une identité singulière, faisant coexister des réflexions existentielles et des thématiques profondes avec une direction artistique extravagante, des mecha gigantesques et des séquences d’humour loufoque. » – Jérémie Priam – La Légende Xenoblade – Third Editions – page 305
Un dernier mot pour parler de la couverture, ici de l’édition standard. Particulièrement sobre, elle arbore les 3 épées qui ont façonné l’identité de la saga: la Monado de Shulk de Xenoblade Chronicles, l’épée de Pyra de Xenoblade Chronicles 2, et la Sept Fétiche de Noah de Xenoblade Chronicles 3. Si l’édition First Print réalisée par Sylvain Ferret est absolument fantastique, l’édition standard n’est pas en reste tant sa sobriété et l’utilisation des couleurs caractérisent aussi parfaitement le dernier chapitre en date de l’histoire de Monolith Soft.
A l’instar des autres ouvrages « La Légende » de Third Éditions, La Légende Xenoblade est un indispensable pour tout fan de la saga qui aimerait approfondir ses connaissances ou la découvrir sous un tout nouvel angle. Jérémie Priam signe ici un premier ouvrage absolument magistral (oui, tant que ça) qui transpire l’admiration aussi bien pour la saga elle-même que pour ses concepteurs. Un must-have dans une bibliothèque geek!