Acclamé par la critique à sa sortie en mai 2019, A Plague Tale Innocence, du studio bordelais Asobo Studio, édité par Focus Home Interactive, est revenu le 6 juillet dernier dans une version « next gen » sur PS5 et Xbox Series X/S. Mise à niveau gratuite pour les possesseurs de la version originale, jeu du PS+ du mois de juillet ou encore disponible dans le Game Pass, bref le jeu indé made in France est sur tous les fronts pour nous permettre de le (re)découvrir dans des conditions optimales en attendant sa suite A Plague Tale Requiem, annoncée lors de la conférence Xbox à l’E3 2021 le 13 juin dernier.

Alors que le trailer de Requiem m’a clairement fait de l’oeil, je n’avais pourtant pas encore fait le jeu original. Faute avouée faute à moitié pardonnée, et j’ai enfin pu rattraper cet inadmissible retard. Après avoir terminé le jeu une première fois (je compte bien partir à la chasse du trophée Platine), je peux donc vous livrer mon avis sur le jeu qui a lancé la réputation d’Asobo Studio.

Avis basé sur la version PS5 obtenue grâce à la version physique PS4 achetée par mes soins.

Nous sommes en 1348 à Guyenne, en France, à l’heure où la peste noire et la guerre de cent ans déciment la population. Nous incarnons Amicia de Rune, fille de Robert et Béatrice de Rune, et sœur ainée du petit Hugo, 5 ans. Malheureusement, la situation de la famille de Rune est délicate. Alors qu’Amicia est élevée par leur père, Hugo quant à lui requiert toute l’attention de leur mère, alchimiste de talent, qui fait son possible pour le guérir d’un terrible mal qui le ronge depuis qu’il a vu le jour. Alors que tout semble aller pour le mieux pour eux, leur maison et leur village est victime de deux inquiétantes menaces qui viennent se mêler à l’épidémie la plus meurtrière que le monde ait connu. La première, la prolifération de rats assez…voraces grouillant par milliers, quant à la deuxième, il s’agit de l’Inquisition qui n’a qu’une seule chose en tête, capturer Hugo, pour une raison que l’adolescente ignore encore. Forcés de quitter leur foyer, Amicia et son frère cadet partent dans un périple pour leur survie quoi qu’il en coûte.

Dès les premières minutes, A Plague Tale Innocence dévoile ses enjeux historiques en plus de proposer un scénario original et inspiré. Centré sur son scénario, il en devient bien vite un voyage des plus touchants, parfois même poignant aux côtés de 2 enfants livrés à eux-mêmes dans un monde qui ne leur veut aucun bien. Il relate des choix nécessaires qu’une sœur doit faire pour protéger son petit frère, ainsi que pour leur survie. De plus, la narration sur une période de plusieurs mois permet également de s’immerger dans l’évolution de la relation, et de ce fait de leur personnalité, entre les 2 personnages principaux, dans laquelle l’inconnu et l’apprentissage fait place à la confiance et à l’union.

Durant les 17 chapitres que nous sommes amenés à dévorer, Asobo Studio réussit à proposer une aventure unique, des personnages attachants, une mise en scène poignante et déchirante dans la simplicité et sans artifices, et un univers atypique dans une France médiévale détruite par la guerre et la maladie. Les mystères qui gravitent autour de la famille de Rune trouvent leurs réponses, leurs explications on ne peut plus inattendues mais racontées grâce à une écriture passionnante. Car il faut bien le dire, la dernière partie du jeu prend un tout autre tournant qui relève à mon goût du génie. Court, comptez entre 10 à 12h pour terminer l’histoire, mais intense, car A Plague Innocence ne s’essouffle pas un seul instant et maitrise ce qu’il tend à vouloir nous raconter.

Car A Plague Tale Innocence est sans aucun doute une expérience plus narrative qu’autre chose, laissant ainsi place à un gameplay simple et intuitif. Tout du long, le jeu se veut ainsi axé sur une approche quasi entièrement furtive permettant donc à ses joueurs de prendre leur temps dans la façon d’avancer. Armée de sa fronde, et grâce à ses talents alchimiques, probablement hérités de sa mère, Amicia a à sa disposition une roue de moyens de défense assez conséquente pour rendre les mécaniques et sa prise en main variées. Sans oublier qu’il est possible d’améliorer tout ça aux divers ateliers et chariots d’alchimistes grâce aux nombreuses matières premières ramassées tout au long du jeu.

Dans sa volonté d’instaurer une certaine relation entre tous les personnages, le jeu est parsemé de quelques phases durant lesquels vous pourrez demander de l’aide à vos compagnons de route.

Mais vous l’aurez compris, le jeu demande de gérer plusieurs types de menaces. D’un côté la menace et la malveillance humaine, dans laquelle l’approche principale est silencieuse et furtive durant laquelle il faut apprendre à créer une diversion pour avancer. Mais il faudra également apprendre à se frayer un chemin parmi les milliers de rongeurs qui grouillent autour d’Hugo et Amicia, en apprenant à faire de la lumière leur meilleure alliée. De ce fait, le jeu nous offre dans sa plus grande bonté quelques coups de sang, de moments de panique et un réel sentiment de devoir agir dans l’urgence le tout en nous proposant d’exploiter les différentes alchimies possibles que maîtrise Amicia mais également en mettant en place quelques énigmes (même si le mot est peut-être un peu fort) à résoudre pour avancer. En somme, A Plague Tale Innocence propose une jouabilité des plus simples à maitriser, c’est un fait, il n’est pas bien difficile, tout en sachant jouer avec l’instinct de survie de ses joueurs.

Mise à niveau next-gen oblige, le jeu d’Asobo propose donc aujourd’hui une expérience en 4K et 60 FPS des plus agréables. Mais malgré la netteté réhaussée grâce à la résolution, A Plague Tale Innocence est bien loin des fioritures habituelles au point même qu’on se demande ce que cette nouvelle version lui apporte réellement.

Et pourtant, A Plague Tale Innocence est le genre de jeu que j’aime à dire qu’il est magnifique. Certes, certaines textures commencent à dater un peu, la qualité des visages peut sembler vieillissante également, on lui accorde même la présence d’un certain floutage des arrières plans et pourtant, malgré tout cela, il propose une expérience visuelle somptueuse tant par la beauté de certains plans de caméra, que par le passage des diverses émotions présentes dans le jeu au travers du regard des personnages mais aussi par son esthétique unique. En effet, c’est en regardant à nouveau mes captures d’écrans que cela m’a sauté aux yeux. Sa direction artistique singulière lui donne un côté très « artworks » et un cachet non négligeable qui se rapproche presque du dessin.

Sur PS5, s’ajoute également l’utilisation de la DualSense. Elle aussi se veut assez discrète et pourtant elle est bien présente dans notre immersion dans A Plague Tale. En effet, on croisera principalement l’utilisation du moteur haptique pour les vibrations. On remarquera donc les différences de vibrations en fonction de la surface sur laquelle nous marchons ou encore lorsque nous courrons. Loin des fonctionnalités poussées de certains jeux, celles de A Plague Tale Innocence sont tout à fait suffisantes pour le type du jeu.

Jeu français oblige, le doublage dans la langue de Molière est tout à fait réussi, de la synchronisation labiale aux intonations naturelles et émouvantes. Du côté musical, c’est Olivier Derivière qui en est le compositeur (vous avez pu entendre son art dans Assassin’s Creed IV Black Flag ou encore Remember Me et Alone In The Dark (2008) pour ne citer qu’eux), l’OST se veut assez discrète mais reste assez présente pour mettre en valeur les moments forts du jeu. Car il est indéniable que le maitre mot d’A Plague Tale est bien l’immersion.

Alors qu’on me l’a conseillé maintes et maintes fois, je n’avais encore pas pu prendre le temps de jouer à A Plague Tale Innocence, ce jeu indépendant français qui semblait avoir tout pour être un grand jeu. Et maintenant que j’ai pu le faire, mon avis est sans appel: il est bel et bien un grand jeu. D’une part narratif, dans un univers et une époque trop peu exploités dans le jeu vidéo, de l’autre émotionnelle, dans lequel nous suivons une sœur et son jeune frère qui apprennent à se connaître et à se faire confiance au fils des heures mais également contemplatif, tant sa direction artistique, certes simple et loin de certains artifices, ne manque pas de ravir nos pupilles émerveillées. Et pour tout vous dire, je peine à lui trouver de réels défauts qui sauteraient assez aux yeux pour les évoquer. Une chose est devenue claire comme de l’eau de roche: vivement la suite. Mais en attendant, j’y retourne le temps de débloquer le platine.

Les plus

  • Un voyage émouvant de bout en bout
  • Le duo Amicia/Hugo tantôt émouvant tantôt déchirant
  • Un gameplay intuitif
  • Une direction artistique somptueuse au cachet certain proche de « l’artwork »
  • Le contexte historique original
  • Les nuées de rats qui mettent quelques coups de sang
  • Un dernier tronçon d’histoire qui prend un nouveau tournant passionnant
  • Je lutte carrément à lui trouver des défauts

Les moins

  • La mise à niveau next-gen qui peut être perçue comme trop discrète
  • Un tournant de fin de jeu qui peut porter à débat