Présenté pour la première fois lors du Xbox Games Showcase du 11 juin 2023 à travers une vidéo, l’annonce de Jusant a fait mouche sur les plus curieux. Nouveau jeu de DON’T NOD au développement, aux mains de DON’T NOD Studio Paris, Jusant s’est dévoilé être un jeu prometteur grâce à son concept atypique orienté sur l’escalade. Sa direction artistique a immédiatement attiré les yeux. Après plusieurs sessions de preview, et des démos disponibles sur Steam, Jusant est maintenant disponible, aujourd’hui 31 octobre 2023, sur PS5, PC, et Xbox Series S/X ainsi que day one dans le Gamepass. Si la nouvelle production de DON’T NOD est bien loin du thème lié à sa date de sortie, elle s’est dévoilée à mes yeux une jolie pépite comme on en voit peu.
Version | Numérique sur PS5 fournie par DON’T NOD |
Temps de jeu | Environ 10h (pour 2 runs) |
Histoire terminée | Oui |
Complétion totale | Non communiquée par le jeu (43% des trophées, seuls les trophées liés au collectibles n’ont pas été débloqués) |
Difficulté | Unique (sans toucher aux options d’accessibilité) |
Genre | Aventure, puzzle, plateformes |
Date de sortie | 31 octobre 2023 |
Prix (maximum conseillé) | 24€99 (ou disponible day one dans le Gamepass) |
Plateforme(s) | PS5, Xbox Series S/X, PC (Steam) |
Voix | / |
Textes | Français, Anglais, Italien, Allemand, Espagnol, Japonais, Coréen, Polonais, Portugais, Russe, Chinois simplifié |
Jusant: n., m., terme maritime qualifiant la période pendant laquelle la marée est descendante.
Dans un monde désolé, et vide de toute vie, nous incarnons un jeune garçon accompagné d’un étrange compagnon, un Ballast, dernière source d’eau restante. Leur périple les amène à une mystérieuse tour qu’il leur faudra gravir, traversant une civilisation disparue.
Sans avoir besoin de prononcer un seul mot durant toute l’aventure, Jusant nous propose le fond de son histoire au travers de son level design, ses décors, et environnements mais aussi au travers de ses nombreuses lettres, extraits de journaux, et fresques parsemés tout au long de notre ascension. Une histoire implicite profondément touchante, voire même mélancolique, dont le cœur est la reconnexion avec la nature, et avec un profond message d’espoir, celui de trouver des réponses au bout du chemin périlleux qui se profile au dessus de nous.
D’une poésie rare, de par son ambiance apaisante, une solitude omniprésente et reposante, Jusant dévoile une aventure unique grâce à son gameplay atypique centré sur l’escalade. A l’instar de Chants of Sennaar sorti le 5 septembre, le patrimoine vidéo-ludique français se voit une nouvelle fois sublimé par l’imaginaire d’un studio, pour le premier Rundisc, ici DON’T NOD Studio Paris, dont l’humanité se révèle être un moteur, une inspiration derrière un message profondément écologique assumé.
Vous l’aurez donc compris, notre but est d’atteindre le sommet de cette montagne, cette tour grâce à l’escalade pure. Si l’escalade est une mécanique aujourd’hui particulièrement exploitée dans de nombreuses productions (Assassin’s Creed, Breath of the Wild, Death Stranding, Horizon, etc), notamment dans les RPG, rares sont les jeux qui en ont fait leur cœur, leur ADN et leur identité. Dans ce concept de gameplay, seuls quelques jeux peuvent être cités, notamment Climber: Sky is the Limit d’A2 Softworks, mais aussi The Climb, jeu en réalité virtuelle de Crytek, et maintenant Jusant. Ainsi, le jeu de DON’T NOD s’offre une porte ouverte à un genre et un gameplay qui se font rares, et a donc de fortes chances de nous dépayser.
Et le pari est ici largement réussi. Au travers de plusieurs biomes, au nombre de 6, pour le même nombre de chapitres (le jeu révèle une durée de vie avoisinant les 5/6h seulement), accompagné de son ballast et de son matériel d’escalade, notre protagoniste va donc partir à la conquête des cimes pour atteindre son point de chute. Traversant différentes météos, différents environnements, dont la faune et la flore sont uniques, Jusant propose un gameplay simple mené par la maniabilité de nos 2 gâchettes, une pour chaque main. Une maniabilité, qui dans ses premiers instants déroute, mais se veut incroyablement réussie par sa précision et l’immersion qui en découle. Non sans être parfaite, évidemment, par la présence de quelques bugs de collision qui n’entacheront pas forcément notre ascension, mais il reste utile de le mentionner.
Mais bien plus loin que la simple force de nos bras et nos jambes, représentée par une barre d’endurance qu’on ne pourra faire évoluer, l’escalade de Jusant demandera une certaine analyse de ce qui nous entoure. Ainsi, il propose donc plusieurs itinéraires, à notre bon cœur de choisir celui que l’on voudra prendre, tout en exploitant avec soin son level design qui regorge de surprises. En effet, il ne se limite pas qu’à de simples prises rocheuses naturellement formées, et la présence du Ballast et notre lien avec lui ne sont pas anodins. Son Echo permet d’interagir avec de nombreux éléments du décor, permettant ainsi de nous révéler de nombreuses prises mouvantes. De plus, la météo est également au cœur de notre ascension, cohérente avec les biomes que nous traversons. Ainsi, on pourra aussi bien traverser un climat tantôt caniculaire qui influera sur la gestion de notre endurance, entre autres, mais aussi venteux, qui pourra nous faire dévier de notre trajectoire. En résulte un gameplay dont le dépaysement est au cœur du jeu, au même titre qu’il se révèle incroyablement apaisant, rondement mené par le sentiment de solitude qui réside dans notre périple. Sur PS5, on regrette néanmoins l’absence de fonctionnalités de la Dualsense qui auraient pu la démarquer des autres plateformes.
Je vous en parlais brièvement dans ma preview du mois d’août, Jusant, tant dans son sentiment de solitude que dans l’exploitation de la nature pour nous aider à avancer, a ce petit quelque chose qui nous rappelle indéniablement un certain Death Stranding. Une inspiration qui peut paraître tirée par les cheveux, mais qui pourtant est assumée par le studio. Dans une interview datant du 11 septembre, Kevin Poupard et Mathieu Beaudelin, co-directeurs créatifs, affirmaient:
« C’est dans la variation de terrain, de la charge à transporter, et dans l’histoire que s’appuie Death Stranding pour proposer à chaque fois des moments uniques malgré le côté faussement walking simulator. On doit planifier, analyser le parcours et faire des choix quasi à chaque seconde (par où je passe, est-ce que je saute ou contourne cette crevasse etc). C’était vraiment très inspirant pour nous. »
Des extérieurs et des panoramas d’une beauté vertigineuse, des grottes aux lumières et aux couleurs resplendissantes, des troglodytes inhabités, Jusant propose une expérience visuelle à couper le souffle, jouant, tantôt, sur la verticalité, tantôt sur l’horizontalité des quelques « villages » abandonnés. Si son style graphique révèle une certaine simplicité, l’Unreal Engine 5 est malgré tout ici maitrisé, de par une direction artistique, quant à elle, d’une incroyable efficacité pour nous faire voyager dans son univers. Un voyage contemplatif fort d’une identité visuelle fabuleuse, de par les jeux de lumières sans oublier ses couleurs flamboyantes.
Mais si Jusant sait jouir de nombreuses forces, impossible d’en parler sans évoquer sa somptueuse bande originale. A l’image du reste du jeu, derrière ses musiques, composées par Guillaume Ferran, se cache une véritable narration musicale dont l’ascenseur émotionnel est au rendez-vous. De ses mélodies jouées au piano, à ses percussions rythmées, en passant par les douces cordes d’un violon, Jusant est un joyau auditif tant les différentes émotions y sont brillamment retranscrites. L’espoir, le désespoir, l’éternelle solitude qui nous accompagne tout au long de notre périple, et je n’en cite que quelques uns. Au delà d’un message visuellement marquant, nul besoin de regarder une scène pour comprendre ce qu’il se passe à l’écran. Au point où à la fin de mes 2 runs, les larmes se sont mises à couler par la beauté de l’instrumentalisation des mélodies.
2023 est décidément une incroyable année vidéoludique, d’une part grâce à ses superproductions mais c’est sans compter sur la scène indépendante qui se révèle d’année en année plus inspirée que jamais. Et cette fin d’année regorge de belles surprises. Après un Chants of Sennaar des plus incroyables grâce au studio toulousain Rundisc, ou encore un Crime de l’Orient Express revisité par Microids Studio Lyon, c’est au tour de DON’T NOD Studio Paris de nous proposer son aventure, unique en son genre, avec Jusant (à prononcer en français rappelons-le, on s’est tous fait avoir). Un voyage contemplatif et auditif d’une beauté incroyable, tant par la maitrise de son univers et de ses thèmes que par son message profond. Par sa simplicité, Jusant étonne et marque. Sans avoir besoin de partir dans les fioritures de gameplay, le jeu de DON’T NOD fait appel à son imaginaire et le nôtre pour exploiter avec brio son level design et ses possibilités. Son OST n’est pas en reste à l’image même de cette aventure touchante et poignante. On regrette néanmoins quelques bugs de collision et l’absence de fonctionnalités de Dualsense, des détails qui peuvent avoir leur importance mais qui peuvent vite être oubliés, tant l’expérience se dévoile marquante ailleurs.
- Une OST somptueuse à en pleurer (si, si je vous assure)
- Une voyage contemplatif et poétique
- La solitude d’un monde éteint
- Le gameplay qui sait évoluer aux bons moments
- Le message de fond particulièrement touchant
- Les liens qui unissent notre personnage et son Ballast
- Un genre rare qui dépayse
- L’analyse de ce qui nous entoure, un level design très bien exploité
- Un jeu profondément apaisant
- L’absence de fonctionnalités de la Dualsense
- Quelques bugs de collisions
- Très court, on en redemande encore